Copropriétés dégradées : la prévention, nécessaire mais difficile

Copropriétés dégradées : la prévention, nécessaire mais difficile

On estime à 100 000 le nombre de copropriétés potentiellement fragiles en France, sur un total de 560 000 copropriétés, d’après les travaux de l’Agence nationale de l’habitat (Anah). Or, depuis 2006, 1000 copropriétés entrent chaque année dans le dispositif des plans de sauvegarde. Et 27% des propriétaires bailleurs ou occupants sont dans les strates les plus pauvres de la société.

« Le problème est devant nous », résume Dominique Braye, président de l’Anah, lors d’une rencontre organisée par l’Association des journalistes de l’habitat et de la ville (Ajibat) sur le thème de la copropriété dégradée, le 15 septembre 2011. D’où l’intérêt d’une action de prévention avant que la copropriété ne sombre dans l’insalubrité.

La ville de Saint-Denis a ainsi décidé de privilégier les travaux d’office plutôt que d’attendre la déclaration d’insalubrité. « Nous avons la volonté d’arriver à 600 000 € de travaux d’office par an sur tout le centre-ville », explique Sabine Loubet, du pôle amélioration de l’habitat de Plaine commune.

Connaître et former
Dominique Braye, qui rendra un rapport sur ce sujet le 31 décembre prochain, souligne la nécessité de disposer de bons diagnostics, ainsi que sur la nécessité de former les copropriétaires : « Nombre d’entre eux ne savent pas qu’ils devront payer des charges ! ».
Selon le président, une copropriété ne peut se relever « que s’il existe une enquête sociale sur les copropriétaires et leur capacité à payer les charges. De ce diagnostic, découle le remède ». Il conviendrait également, selon lui, de travailler sur les relations avec les syndics, pas toujours efficaces et impliqués.

Pour éviter la création de futures copropriétés dégradées, Hervé Chevreau, maire d’Epinay-sur-Seine, impose une moyenne de 80 m² de SHON par logement pour les programmes neufs, « pour obtenir un équilibre entre les grands et les petits logements et prévenir les problèmes des copropriétés avec de petits logements. »
Il espère ainsi limiter les problèmes que poseront à l’avenir les immeubles construits pour des opérations de défiscalisation. « Et je m’oppose à la vente de leur patrimoine par les bailleurs sociaux. Je ne veut pas me retrouver avec de nouvelles copropriétés dégradées ! ».

Autre initiative : la création, en 2010, d’une société publique locale d’aménagement spécialisée dans le traitement de l’insalubrité par la ville et le département de Paris et la communauté d’agglomération Plaine commune, la Soreqa (société de requalification des quartiers anciens).
La Soreqa incite les propriétaires à réaliser les travaux mais peut aussi procéder à l’appropriation publique des immeubles les plus dégradés dont les occupants sont relogés. Le foncier est alors cédé à un maître d’ouvrage public ou privé. La collaboration entre Paris et Plaine commune est née du constat que les marchands de sommeil évincés de Paris réinvestissent en Seine-Saint-Denis.

Nouveaux outils
Pour une action efficace, il manque cependant un certain nombre d’outils. Hervé Chevreau, souhaiterait disposer d’outils permettant le portage de lots massif pour intervenir dans de grosses copropriétés où il serait nécessaire d’acheter une cinquantaine ou plus de logements.
Il demande également « un outil juridique permettant une déclaration d’utilité publique plus facile avec des délais réduits, permettant une maîtrise plus rapide du foncier ».
Autre obstacle : la loi de 1965 sur les copropriétés qui sacralise la propriété, interdit la dissolution d’une copropriété et paralyse la décision avec la règle de l’unanimité. Le rapport de Dominique Braye ira-t-il jusqu’à proposer de la réviser ?