La GRL est-elle un produit d’avenir ?

La GRL est-elle un produit d’avenir ?

La garantie universelle des risques locatifs (GRL2) a été mise en place en décembre 2009 par le secrétaire d’État au Logement, Benoist Apparu, pour améliorer l’accès au logement des plus démunis. Troisième de sa catégorie, après le Pass-GRL et la garantie des loyers impayés (GLI), le dispositif ne remporte pas le succès attendu. Une ultime « évolution » est actuellement en discussion entre l’APGL, la FFSA et les pouvoirs publics.

Avant que la loi « Molle » (1) de 2009 ne vienne interdire le cumul d’une caution et d’une garantie de loyers impayés (GLI) – sauf pour les étudiants et les apprentis -, le fonctionnement de cette dernière était relativement simple. Était généralement éligible à la GLI un candidat locataire dont le taux d’effort était inférieur à 33%, c’est-à-dire lorsque le loyer représentait moins du tiers de ses revenus. Si le taux d’effort était compris entre 33% et 50% ou si le candidat ne disposait pas d’un contrat de travail à durée indéterminée (CDI), une caution personnelle était exigée par la plupart des assureurs.

Bien que cette caution ne soit contractuellement nécessaire que dans des cas précis, les professionnels de l’immobilier et les bailleurs privés avaient tendance à généraliser cette pratique, si bien que la caution était devenue un sésame discriminant.

 

 

 

En 2006, l’État, refusant la seule logique du marché, s’engageait avec les partenaires sociaux sur un dispositif de garantie des risques locatifs (Pass-GRL) garantissant aux bailleurs qui acceptaient un aménagement des critères de solvabilité à l’entrée dans les lieux le paiement des loyers et des détériorations éventuelles. Ce premier dispositif prévoyait également un traitement social par l’Association pour l’accès aux garanties locatives (APAGL) pour les locataires débiteurs. Le taux de référence était fixé à 1,80% du loyer et des charges pour les professionnels de l’immobilier et à 2,50% TTC pour les bailleurs privés.

Dans la pratique, le candidat locataire devait obtenir un Pass-GRL pour justifier de son éligibilité au dispositif. Sa délivrance et le traitement des sinistres étaient pris en charge par l’organisme GRL Gestion, qui assurait également la promotion du dispositif. Quelques assureurs (CFDP, CGIA, DAS, L’Équité, Sada…) ont adhéré à ce premier dispositif afin de disposer d’une offre complémentaire sans assumer les sinistres : l’assureur conservait 33% des cotisations HT à titre de frais de commercialisation et de gestion et réservait le solde à GRL Gestion pour assurer le paiement de sinistres.

Malgré une importante communication commerciale, le succès ne fut pas au rendez-vous. Aux réticences des bailleurs s’ajoutèrent très rapidement les inquiétudes des professionnels devant la flambée de la sinistralité et la lenteur dans la gestion des dossiers de sinistre par GRL Gestion.

 

 

 

On peut considérer, néanmoins, que ce premier dispositif était complémentaire de la GLI classique, apportant une solution à la fois aux locataires précaires et à ceux qui ne pouvaient pas présenter de caution. Cette complémentarité fut encore plus évidente après mars 2009, pour pallier l’interdiction de cumul entre GLI et caution fixée par la loi « Molle ». Toutefois, cette complémentarité, en officialisant un régime discriminant de GLI, n’était pas favorable pour l’équilibre du dispositif. Il fallait donc le faire évoluer. En 2009, l’APAGL, la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA) et les assureurs concernés engagèrent une longue et commune réflexion pour délimiter le périmètre de la garantie universelle des risques locatifs (GURL), destinée à se substituer à la GRL. Le décret 2009-1621 du 23 décembre 2009 en fixe les nouvelles conditions, avant qu’elle soit très rapidement rebaptisée GRL2.

À la différence du premier, ce nouveau dispositif redonne aux assureurs signataires d’une convention partenariale avec l’APAGL un rôle majeur pour la souscription et la gestion des contrats et des sinistres. De son côté, l’association assure le contrôle de la mise en place du dispositif, le suivi d’un éventuel traitement social et la promotion institutionnelle. Des garanties socles ont été définies, les assureurs ayant la possibilité d’annexer à leur contrat des garanties complémentaires ou optionnelles.

Le dispositif permet de garantir tous les locataires avec un taux d’effort maximal de 50%. En fonction de ce dernier, ou d’une précarité liée à la nature ou à l’absence d’un contrat de travail, une compensation financière est versée aux assureurs en cas de sursinistralité, par le canal d’un fonds GRL géré par l’Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL) et alimenté par l’État et par Action Logement (la participation des employeurs à l’effort de construction).

Pour les garanties socles (loyers impayés, dégradations locatives et frais de contentieux), le taux préconisé est de 2% du loyer charges et taxes comprises. Les tarifs sont libres pour les garanties optionnelles.

Malgré ces modifications et ses avantages, ce dispositif n’a pas encore séduit les assureurs. Seules la CGIA, DAS et la MAL se sont engagées à le distribuer. Les assureurs traditionnels de la GLI ont, depuis mars 2009, aménagé les conditions d’acceptation de leur contrat classique (redéfinition des revenus à prendre en compte, augmentation du taux d’effort acceptable à 35%, 37%… 40%), plutôt que de s’engager dans la diffusion de la GURL.

Les incertitudes sur l’avenir économique du dispositif, la complexité et la lourdeur administrative de la gestion prévue par le cahier des charges et la convention partenariale de l’APAGL peuvent expliquer les réticences des assureurs, sans compter que l’exigence d’une gestion dématérialisée des flux d’information oblige à des investissements informatiques importants. Cependant, reconnaissons-le, ce dispositif donne une visibilité bien supérieure sur le portefeuille assuré, comparé au système de gestion archaïque encore en vigueur sur le marché de la GLI, où le papier reste roi ! Enfin, les bailleurs privés et les professionnels de l’immobilier ont toujours à leur disposition des solutions de GLI plus économiques… Cette situation de marché et le faible nombre d’assureurs engagés hypothèquent l’avenir du dispositif, l’indispensable mutualisation des risques étant impossible.

 

 

 

Malgré le volontarisme de l’État, la qualité des garanties proposées, son rôle social évident et le fait que la GRL a permis, en 2010, à 2 000 locataires par semaine d’entrer dans un logement locatif privé, des évolutions sont nécessaires. L’indispensable simplification du cahier des charges, avec, notamment, l’aménagement des pénalités prévues en cas de non-respect de la convention partenariale, suffira-t-elle à convaincre d’autres assureurs ? La proposition d’Alain Ledemay, le directeur général de la CGIA (groupe CGAIM), de mettre à la disposition des compagnies intéressées le module informatique déjà opérationnel trouvera-t-elle un écho pour débloquer la situation ?

En raison d’un manque de communication, le dispositif est insuffisamment connu ou mal compris, le traitement social est mal perçu et souvent assimilé, à tort, à un droit au maintien dans les lieux… L’avenir de la GRL2 repose donc sur une amélioration du système actuel, mais également sur une réflexion relative au rôle social et à l’utilité économique d’un dispositif pérenne garantissant à la fois l’accès au logement et la rentabilité des investissements immobiliers du parc privé. Tel est le but des travaux engagés depuis décembre 2010 par l’APAGL, la FFSA et les pouvoirs publics afin d’aboutir à une « ultime » évolution.